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Apport de titres à une holding : la soulte remise en cause

Publié le 06 février 2017

Il est assez courant que, pour des raisons opérationnelles, financières, patrimoniales, un chef d’entreprise constitue une société holding en y apportant les titres qu’il détient dans sa ou ses sociétés opérationnelles.

 

Pour peu que la holding soit soumise à l’impôt sur les sociétés, la plus-value constatée à l’occasion de cette opération, différence entre la valeur réelle d’apport et le prix d’acquisition des titres de la société opérationnelle (souvent égal au capital initial lorsque le chef d’entreprise en est le fondateur), n’est pas imposée immédiatement mais est placée en report (art. 150 0 B ter du Code général des impôts).

 

Ce régime permet, sans imposition sur le moment donc, de procéder à une structuration qui peut s’avérer utile pour la stratégie du groupe, mais qui ne dégage a priori pas de cash.

 

L’apport peut toutefois, sans remettre en cause le report d’imposition, être réalisée avec soulte à condition que celle-ci n’excède pas 10% de la valeur nominale des titres reçus.

 

Par exemple, les titres d’une société valorisée à 100 K€ sont apportés à une nouvelle holding à l’IS et sont rémunérés par des titres de la holding pour une valeur de 90 K€ et par 10 K€ de soulte.

 

Comme la holding n’a, a priori, pas de trésorerie au départ – on ne lui apporte que des titres, la soulte est inscrite au compte courant de l’associé apporteur qui fera l’objet d’un apurement au fur et à mesure de la progression de la trésorerie souvent due aux dividendes versés par la filiale opérationnelle. Cet apurement se fait sans imposition chez l’associé puisqu’il ne s’agit que du remboursement d’une dette.

 

L’administration fiscale s’est émue récemment de cette « niche fiscale », pourtant prévue par le Code lui-même, le procédé permettant, selon ses termes,  « [d’]appréhender des liquidités en franchise d’impôt ». 

 

Elle estime désormais que ce type de montage est susceptible d’être redressé selon la procédure d’abus de droit avec une pénalité de 40% ou 80% des droits éludés selon le cas.

 

Les premiers redressements qui ont été réalisés courant 2016 montrent que l’administration estime que la soulte serait une distribution de dividendes réalisés par la filiale, en écartant l’existence même de la holding. Elle impose alors, au titre de l’année de l’apport, le montant de la soulte à l’impôt sur le revenu et aux contributions sociales selon le régime des revenus de capitaux mobiliers, sans l’abattement de 40% réservé aux distributions décidées en assemblée générale (par hypothèse aucune décision de ce type n’a été prise dans la filiale). 

 

Cette position tout à fait contestable sur de multiples plans (existence d’un abus de droit, contradiction avec les dispositions législatives, régime d’imposition, application de l’amende pour abus de droit aux contributions sociales, …) est manifestement destinée à être appliquée désormais dans tous les contrôles fiscaux de groupe.

 

Parallèlement à cette attaque sur les opérations déjà réalisées, le législateur est intervenu dans la loi de finances rectificative pour 2016 pour mettre fin à cette situation de non-imposition.

 

Ainsi depuis le 1er janvier 2017, la soulte, pour être toujours autorisée sans remise en cause du report d’imposition, n’en sera pas moins immédiatement imposable à l’impôt sur le revenu et aux contributions sociales et ce, sous le régime des plus-values, donc avec le bénéfice des abattements pour durée de détention.

 

Il est intéressant de noter au passage que ce régime des plus-values rend difficile à tenir la position de l’administration sur ses contrôles consistant à appliquer le régime des dividendes sans abattement.

 

Quoi qu’il en soit, l’administration fiscale a juré la perte de la soulte. Encore une illustration de la devise du directeur actuel du contrôle fiscal à Bercy : « Optimisation = Fraude » !

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