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Révocation ad nutum : le motif doit être communiqué au dirigeant révoqué

Publié le 16 septembre 2013

La plupart des dirigeants des sociétés commerciales ne peuvent être révoqués que pour justes motifs. A défaut, leur révocation donne lieu à l'octroi de dommages-intérêts. Cette notion de juste motif, construite par la jurisprudence, est plus large que la simple notion de faute en ce qu'elle vise par exemple l'attitude du dirigeant, même non fautive, de nature à compromettre l'intérêt social ou le fonctionnement de la société.

Au sein des sociétés anonymes, les conditions de la révocation des administrateurs et du président du conseil d'administration sont différentes. Ces derniers sont en effet révocables à tout moment et sans juste motif. Si cette révocation ad nutum ne nécessite pas de faute, elle ne doit toutefois pas intervenir dans des circonstances révélant une faute ouvrant droit à réparation d'un préjudice sur le fondement de l'article 1382 du code civil, la révocation devenant alors abusive.

Est ainsi abusive, selon la jurisprudence, la révocation ayant lieu sans respect du principe du contradictoire et ne mettant pas un dirigeant en mesure de présenter ses observations avant la décision de révocation (Cass. Com. 24 février 1998 n°95-12.349).

Dans un arrêt récent (Cass. Com. 14 mai 2013 n°12-15.119), la Cour de cassation est allée plus loin en opérant un revirement de jurisprudence et en précisant que, pour respecter les droits de la défense, un motif de révocation doit être communiqué au dirigeant avant la décision, même lorsque la révocation sans juste motif ne donne pas lieu à indemnisation.

Au cas d'espèce un administrateur d'une société anonyme, également président-directeur général, avait été révoqué lors d'une assemblée générale. Il avait demandé des dommages-intérêts pour révocation abusive et reprochait à la société de ne pas avoir respecté le principe du contradictoire. La Cour de cassation a censuré la décision de la Cour d'appel qui aurait dû chercher si l'intéressé avait eu connaissance des motifs de sa révocation avant qu'il ne fut procédé au vote.

L'absence de juste motif ne signifie donc pas l'absence de motif et ce dernier doit être communiqué au dirigeant révoqué !

Cette décision parait d'une portée pratique primordiale en ce qu'elle conforte indéniablement les droits de la défense des dirigeants révoqués ad nutum. Elle doit corrélativement inviter les sociétés anonymes -- et peut-être peut-on d'ailleurs le regretter -- à strictement respecter un formalisme important lors de la mise en œuvre de telles procédures de révocation de leurs dirigeants. En toute logique, cette jurisprudence parait devoir s'appliquer également aux sociétés par actions simplifiée dont les statuts fixent les conditions de révocation des dirigeants et peuvent prévoir une révocation ad nutum.

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