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Le contrôle fiscal à l’ère du BigData

Publié le 31 mars 2017

L’administration fiscale a pris depuis déjà de nombreuses années le train du numérique : formulaires dématérialisés, généralisation des déclarations en ligne, paiement en ligne, réclamations en ligne, contact par mail systématisé, espace contribuable professionnel et particulier, plate-forme d’échanges de documents, etc… Notre administration ne cesse de se moderniser et on ne peut que s’en féliciter.

Le contrôle fiscal n’a pas échappé à cette évolution mais elle n’est peut-être pas aussi enthousiasmante que celle de la gestion de l’impôt.

Certes, le contrôle fiscal est toujours encadré par des procédures strictes basées sur des échanges papiers : avis de vérification, demande d’information, notification de contrôle informatisé, proposition de rectification, convocation aux Commissions départementales ou aux recours hiérarchique… autant de courrier recommandé avec accusé de réception.

Mais compte tenu de l’informatisation aujourd’hui systématique des comptabilités, le contrôle classique se transforme souvent en contrôle informatique laissant la main aux informaticiens de Bercy.

Dès le début du contrôle, la société doit en effet délivrer son « fichier des écritures comptables » ou FEC, un fichier informatique normé contenant la totalité des écritures comptables d’un exercice soumis au contrôle. Pour trois exercices vérifiés, trois fichiers différents, pouvant représenter des dizaines voire des centaines de milliers de lignes comptables, avec tous leurs détails : date, numéro de compte, libellé, numéro d’écriture, référence de la pièce comptable, date de cette pièce, montant en débit ou crédit, lettrage, devise, date de validation de l’écriture…

Bien sûr, ces éléments étaient déjà accessibles à l’administration via le grand livre. Mais, compte tenu de la masse d’information à examiner, souvent présentée sous forme d’un listing papier de plusieurs centaines de pages, le contrôle se cantonnait à des sondages et ne pouvait être exhaustif, les tests de cohérence étaient fastidieux…

Mais voilà, le FEC est arrivé. Et l’analyse informatique avec. 

L’administration prend le FEC, le fait entrer dans sa moulinette secrète et en sort tout un tas d’information, de rapprochements automatiques, d’incohérences, prêts à servir à des rehaussements. C’est tout juste si le système ne produit pas le texte de la proposition de rectification…

L’administration va même plus loin : ayant accès à tous les logiciels qui contribuent à la passation des écritures comptables, elle réalise des extraits de la comptabilité analytique pour servir un redressement sur les prix de transfert, elle effectue des calculs statistiques sur la facturation, démontrant par exemple que vos clients particuliers sont en fait des professionnels compte tenu des volumes achetés sur l’année par rapport aux volumes moyens par client, impliquant alors le respect des obligations de facturation afférentes aux professionnels et conduisant parfois à l’application d’une pénalité de 50% du chiffre d’affaires concerné.

Le problème de ces analyses réside dans le fait qu’elles sont assez opaques. Réalisées par des informaticiens, elles sont souvent présentées trop succinctement et trop techniquement pour pouvoir être comprises et donc, sinon contestées, du moins débattues. Pire, l’informaticien contrôleur fiscal est parfois inaccessible au contribuable, l’inspecteur sur le terrain faisant écran et le dialogue étant réduit à sa plus simple expression. Dès qu’une contestation survient, la réponse est toujours la même : « c’est notre informaticien qui… » mais vous ne voyez jamais l’informaticien…

C’est le problème des experts, que l’on rencontre dans bien d’autres domaines, notamment dans les contentieux sur le crédit d’impôt recherche où le débat technique a du mal à avoir lieu, les experts du Ministère de la recherche étant toujours en seconde ligne.

Ces contrôles informatiques qui se systématisent conduisent à une forme de déviance du contrôle fiscal. L’inspecteur en charge du contrôle s’en remet presque corps et âme à l’informaticien et perd de vu l’analyse des documents qui soutiennent la comptabilité. Ainsi en est-il de de l’analyse statistique conduisant à l’amende pour non respect des règles de facturation qui, on le voit dans certains contrôles, se substitue à l’examen des factures elles-mêmes, des documents papiers, pourtant seules à être soumises à ces obligations. Or ce n’est pas parce que ma base de données de facturation ne mentionne pas tel ou tel élément qu’il n’est pas présent sur la facture. On peut très bien, par exemple, ne pas avoir le taux de TVA dans sa base de donnée, mais l’avoir sur la facture parce qu’il est inscrit sur le modèle de facture que ma société utilise.

Bien sûr, on peut contester cette approche, on peut considérer que ces contrôles informatisés ne respectent pas le principe du contradictoire et s’enfermer dans un discours contestataire.

Il est sans doute plus efficace d’anticiper le contrôle par une politique globale visant le système comptable dans son ensemble.

L’analyse des flux informatiques entre les différents modules de la société conduisant à la formation des écritures comptables va tout d’abord permettre de délimiter le périmètre d’intervention d’un contrôle informatisé et, par diverses mesures appropriées, de le restreindre.

Ensuite, un examen minutieux du FEC, comprenant l’étude de la capacité de l’entreprise à fournir un FEC aux normes, va mettre en lumière les incohérences que l’administration pourrait détecter afin d’y remédier dans toute la mesure du possible ou de les expliquer par avance.

Enfin, vérifier que, dans l’ensemble des modules accessibles à l’administration, il n’existe pas de données absurdes sans lien avec la réalité (par exemple une configuration non aboutie), sur lesquelles l’administration pourraient tout de même fonder un redressement, est indispensable.

Aujourd’hui, la fiscalité est devenue autant une affaire de spécialiste en droit fiscal qu’en informatique. C’est la raison pour laquelle le cabinet a développé une expertise spécifique à la croisée de ces deux matières, en créant notamment un outil unique d’analyse du FEC permettant une anticipation des risques fiscaux, que nous mettons au service de nos clients.

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